Sites Web : Saison théâtrale 2011 / 2012 - Blog de Michèle Picard

Publié le lundi 23 mars 2009

⇒ http://www.michele-picard.com

Le blog de Michèle Picard, maire de Vénissieux, député suppléante du Rhône

Saison théâtrale 2011 / 2012

Septembre 2011, par admin

Le 19 septembre 2011

Retrouvez l’intervention de Michèle Picard, à l’occasion de la présentation de la saison théâtrale 2011 / 2012 à Vénissieux, Jeudi 15 septembre 2011.

Ce sont les trois coups de la rentrée du Théâtre de Vénissieux. Trois coups très particuliers cette année car, comme chacun sait, Gisèle Godard quitte la direction pour une retraite bien méritée. 16 ans de passion, 16 ans d’un travail et d’un engagement sans faille pour la création et le spectacle vivant, 16 ans de dévouement pour que l’art, dans toutes ses formes, soit le sédiment du vivre-ensemble, de la tolérance et de l’ouverture d’esprit, 16 ans pour infuser encore et encore auprès des enfants, des habitants, la richesse de la culture populaire. 16 ans pour briser les frontières des discriminations, et faire d’un théâtre un lieu de cohésion sociale et d’émancipation. 16 ans aussi d’amour de la langue, des textes, et des troupes d’acteurs qui sont venues brûler leur passion sur les planches vénissianes.

Ce que nous laisse Gisèle Godard, c’est plus qu’un théâtre en état de marche, c’est un héritage, un legs, et disons-le de but en blanc : une vraie réussite. La connaissant si proche des compagnies et de l’art, là où il bouillonne et là où il entre en résonance avec son public, je suis certaine que Gisèle doit être fière d’avoir été à l’origine de huit résidences d’artistes, et de 45 créations de jeunes compagnies depuis 1997. Fière aussi d’avoir fait passer la moyenne de fréquentation du théâtre de 50 spectateurs par soirée à son arrivée à 300 aujourd’hui. Fière de porter la puissance de l’art dans des quartiers qui en étaient privés, fière de l’avoir démocratisé auprès des enfants, des élèves, fière de tout ce travail accompli avec les écoles, collèges et lycées de Vénissieux.

Militante de l’art, comme elle aime à se décrire, Gisèle Godard aura su casser les idées reçues en faisant d’une programmation pointue, variée, l’antidote au formatage ou à l’élitisme de la culture actuelle. Pas étonnant pour une femme qui a embrassé le théâtre dans le bouillonnement des années 1965-1975, alors que deux figures essentielles de la scène lyonnaise et nationale allaient donner le ton : Roger Planchon et Marcel Maréchal. Des artistes qui ont des choses à dire, singulières, personnelles, qui ont des univers bien affirmés, voilà ce que le théâtre de Vénissieux a accueilli sous la direction de Gisèle Godard. De Fellag à Nougaro, des Transformateurs à la Compagnie Haut et Court, d’Aldo Romano à Ahmad Jamal, de la musique aux textes, de la danse aux spectacles pour enfants, le singulier de la création est devenu l’universel, l’émotion, le questionnement des spectateurs.

Cet éloge à Gisèle Godard et à la mission qu’elle a remplie avec intelligence et sensibilité, je l’adresse également à l’administrateur du théâtre, François Clamart, qui lui aussi a quitté ses fonctions. Si impressionnant soit-il, le bilan dressé ne doit pas tétaniser Françoise Pouzache, nouvelle directrice, et Sébastien Duenas, qui prennent le relais, et dont l’engagement pour le théâtre vivant nous promet de belles soirées. Je leur souhaite donc la bienvenue et je souhaite à Gisèle une bonne retraite, qui ne devrait jamais être très éloignée des planches et du monde de la création.

Jules Renard disait : « Nous voulons de la vie au théâtre, et du théâtre dans la vie ». C’est cette philosophie et cet esprit qui dominent et animent ces lieux depuis 1995. Dresser des passerelles entre les artistes et les différents publics, être à l’écoute des expressions culturelles nouvelles, soutenir la création contemporaine, mettre à disposition des équipements de qualité aux Vénissians : notre ambition en matière culturelle ne se dément pas. Elle est ambitieuse et diversifiée, avec la signature il y a peu, de la convention Scène Rhône-Alpes, un partenariat fidèle avec le TNP de Villeurbanne, l’accueil et la résidence de la Compagnie Haut et Court, et un budget dont nous pouvons être fiers. Nous consacrons 11% de nos dépenses de fonctionnement à la culture.

Pourquoi un tel investissement ? Parce que l’expression artistique et la culture pour tous, ont plus que jamais leur place dans des villes populaires comme la nôtre. Je crois à leurs vertus, je crois à la puissance de la fiction, et à son rayonnement dans le cheminement des êtres que nous sommes, à la richesse immatérielle qu’elle procure dans l’esprit d’un enfant. Parce que les loisirs, l’éveil et la sensibilisation à d’autres univers ne doivent pas être l’exclusivité des beaux quartiers. Fêtes Escales, cinéma Gérard Philipe, école de Musique, médiathèque, bibliothèques de quartier, ateliers d’arts plastiques, notre théâtre bien sûr : voilà les pôles et les rendez-vous d’une culture enracinée solidement à Vénissieux, et sur l’ensemble de son territoire, sans oublier de mentionner les partenariats avec le réseau associatif : Pandora, Bizarre, la compagnie Traction Avant. Pourtant, et gardons-le à l’esprit tout au long de la saison qui s’ouvre, jamais la scène, la création et la culture, n’ont été autant en danger, autant fragilisées.

Il y a déjà l’Etat et les conséquences terribles de la politique gouvernementale actuelle. Absence d’ambitions, un budget national en dessous du 1%, un ministère de la Culture au pain sec, dont l’objectif est de retirer 30 millions d’euros au secteur de la création en 2011, un redéploiement des crédits aux scènes conventionnées, qui fait craindre le pire aux acteurs de la culture. Précarité pour les intermittents, austérité pour les DRAC, casse des services publics de la culture : les années Sarkozy vont se payer cher, très cher. Deuxième péril : l’étranglement financier des communes par l’Etat et la réforme des collectivités territoriales. Ce sont ces dernières qui représentent le principal soutien de la création culturelle, alimentant jusqu’à 70% de certains budgets, notamment ceux des festivals. La tentation de supprimer la clause dite de compétence générale, interdirait aux collectivités de financer le secteur des arts et de la culture, cette compétence ne leur étant plus dévolue. Pour les associations locales, les ressources vont se tarir, et les difficultés afin de boucler les budgets vont décupler.

Au final, c’est l’ensemble du maillage culturel de proximité qui risque d’être profondément déstabilisé. Là encore l’Etat et le gouvernement sont responsables de la situation. Ils sont en train de dévitaliser, de nier l’apport de la culture en tant qu’outil précieux, indispensable, à l’aménagement de nos territoires, au vivre-ensemble, à la tolérance. Enfin, dernier péril, mais pas des moindres : la déréglementation et la « marchandisation » de la culture actuelle. Ce sont les modes de production et les modes de financement privés des grands groupes de communication, qui font glisser la notion d’œuvre vers la notion de produit. En amont même du processus de création, ils cherchent la rentabilité, la diffusion de masse en gommant les aspérités, les subversions, en normalisant et formatant les contenus, le fond, la forme et la diffusion.

C’est une question toute bête que l’on peut se poser, mais aujourd’hui en 2011, les films de Bunuel trouveraient-ils des producteurs ? Je n’en suis pas sûre. N’oublions pas que l’art nous touche car il sait aussi nous déranger.

Je souhaite à chacun de vous une très belle saison 2011-2012 au Théâtre de Vénissieux.

→ Lire la suite sur le site d’origine…


Revenir en haut